En Biélorussie, la répression s’amplifie

Alors que des milliers de Biélorusses continuent de protester contre la réélection, dimanche 9 août, d’Alexandre Loukachenko, la police a décidé de riposter avec des balles réelles.
Les autorités biélorusses ont en effet admis mercredi avoir ouvert le feu à Brest (sud-ouest), faisant un blessé. « Un groupe de citoyens agressifs armés de barres de métal a attaqué des agents de la police. Des armes à feu ont été utilisées pour protéger la vie et la santé des forces de l’ordre », a confirmé la porte-parole du ministère de l’Intérieur dans un communiqué.
Quelque 6 000 manifestants ont été arrêtés depuis dimanche. « Il n’y avait jamais eu de manifestations d’une telle ampleur et sur une telle durée et il n’y avait jamais eu une répression d’une telle violence », a estimé Oleg Goulak, du Comité Helsinki, une ONG de défense des droits de l’homme.
Deux hommes sont morts depuis le début des manifestations, dont un à Minsk, la capitale, et le second dans un hôpital de Homiel. Selon les informations du Monde, une fillette de 5 ans a par ailleurs été blessée mercredi à Hrodna. Alors qu’internet est fortement perturbé depuis le scrutin, de nombreux journalistes locaux et étrangers ont été passés à tabac et arrêtés.
Au pouvoir depuis 26 ans, Alexandre Loukachenko a été réélu dimanche 9 août pour un sixième mandat. Avec 80 % des suffrages exprimés en faveur du président sortant, la réélection du « dernier dictateur d’Europe » a été dénoncée comme frauduleuse par l’opposition. D’autant que les observateurs internationaux n’ont pas eu le droit de surveiller le scrutin, les autorités arguant des risques liés au coronavirus.
« Pauvre petite fille »
Svetlana Tikhanovskaya, qui a revendiqué la victoire, a dû fuir vers la Lituanie dans la nuit de lundi à mardi. Encore inconnue du public il y a quelques mois, cette prof d’anglais de 37 ans avait créé la surprise en annonçant sa candidature après l’arrestation de son mari pour « trouble à l’ordre public ».
Incarnant le désir de renouveau, la candidate inattendue a réussi à rassembler, jeudi 30 juillet, quelque 63 000 personnes dans un parc de Minsk. Il s’agit du plus grand rassemblement de l’opposition que le pays ait connu dans son histoire récente.
Depuis, la « Jeanne d’Arc de Minsk » n’a cessé de fédérer les anti-régime autour de sa candidature et de galvaniser les foules.
Si pour le président sortant, Mme Tikhanovskaya n’était qu’une « pauvre petite fille » manipulée par des « marionnettes » étrangères, l’intéressée croyait de son côté « que notre président comprendra que son temps est révolu, (que) les gens ne veulent pas de lui ». Elle se déclarait cependant persuadée que l’élection ne se déroulerait pas de manière « équitable ».
Face à l’escalade de violence, les réactions internationales ne se sont pas fait attendre. Exposant sa « très grande préoccupation », Emmanuel Macron a souligné « la nécessité de retrouver la voie du dialogue ». Mike Pompeo a quant à lui estimé que le peuple biélorusse avait droit aux « libertés qu’il réclame », tandis que Michelle Bachelet, haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, a rappelé que les gens « ont le droit de s’exprimer et d’exprimer leur désaccord, a fortiori dans le contexte d’élections, quand les libertés démocratiques devraient être maintenues, et non supprimées ».
Alors que Vladimir Poutine avait très rapidement adressé ses « félicitations » à Alexandre Loukachenko, l’Union européenne décidera vendredi de sanctions éventuelles contre le président réélu.